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Je me souviens de certains dimanches, lorsque mes cousins de Toulouse venaient avec leurs parents à l’écluse pour profiter de l’air de la campagne, pour pêcher aussi, et bien sûr nous rendre visite, ça va de soi.
Mais ce que l’écluse de Vic avait de particulier, c’est qu’elle attirait, par je ne sais quelle magie, les gens des alentours, de Castanet par exemple, alors que l’écluse de Castanet est plus proche que Vic de la commune et des Toulousains, et d’autres aussi. Toutes les occasions étaient bonnes pour venir passer la journée tout près de nous à Vic. Je dois avouer que, en ce qui me concerne, j’étais content de voir arriver les dimanches, sachant que nous aurions de la visite ce jour-là ; ma mère un peu moins, puisque le passage des péniches l’occupait comme les autres jours. Elle devait en plus veiller à ce que les gens regardant les manœuvres à l’écluse avec le bateau dans le sas (nous disions le bassin) ne s’approchent pas trop près (il y a une hauteur de vide de 3 m + 3 m d’eau environ, d’où le danger.)
une gamine et deux gamins se promènent un dimanche le long du Canal du Midi. On aperçoit également des cyclistes.
Quoi de plus banal, me direz-vous ?! J’y viens tout de suite. Je vous ai parlé des dimanches courants, maintenant parlons des jours de fête et des animations qui se déroulaient à cette époque à côté de l’écluse. C’est d’abord le concours de pêche à la ligne organisé par l’Association de pêche de la commune de Castanet qui avait lieu tous les ans le jour du 14 juillet, en amont de l’écluse à environ 100 mètres : les pêcheurs avaient quitté la commune distante d’1 km 600, en groupe avec des supporters, à pied ou à vélo (souvent décorés) ; ils se mettaient à la place qui leur avait été attribuée par l’association de pêche, puis le début du concours était annoncé par un coup de sifflet strident et la pêche pouvait commencer avec une seule canne à pêche par concurrent et ce durant, je crois me souvenir, 1 heure 30. Suivaient le décompte des poissons pêchés, la pesée et le classement des participants. Je devais avoir six ans et j’étais passionné par ce genre de loisir. J’allais très bientôt m’organiser pour avoir une canne à pêche, enfin ce qui lui ressemblait le plus, c’est-à-dire un bambou pour commencer. Plus tard, des cantonniers qui avaient en charge l’entretien du canal me donneraient deux vraies cannes à pêche qu’ils n’utilisaient plus, avec le minimum d’équipement pour m’adonner à mon passe-temps favori à ce moment-là, après le football.
Et maintenant arrive le clou des spectacles, si je puis dire, les jeux nautiques qui étaient organisés par le comité des fêtes de Castanet et les bateliers qui avaient un logement au Port Saint Sauveur à Toulouse, donc tout proches, et ceux qui étaient amarrés près de l’écluse pour l’occasion, avec aussi des sportifs locaux, principalement des footeux de Castanet-Tolosan et des nageurs accros du canal (les piscines, il n’y en avait pas encore à Castanet.)
Les épreuves — un bien grand mot car il s’agissait de se distraire à cette époque, fin des années 40, début 50, la télévision n’existait pas ni internet bien sûr, et les gens avaient besoin de s’amuser, de se rencontrer — se déroulaient juste en amont de l’écluse. Nous pouvions y voir des courses de canots avec, soit un, soit deux pagayeurs, qui devaient s’affronter sur une distance d’une centaine de mètres. C’était assez folklorique, avec quelques chavirements dans la bonne humeur et les bateliers se distinguaient très souvent dans ces jeux, forcément, malgré la bonne volonté des gens des environs. Il y avait aussi la course au canard, où les nageurs devaient poursuivre puis attraper un canard qui avait été lâché devant eux et qui en faisait voir de toutes les couleurs aux poursuivants, des plumes volaient au-dessus de l’eau avant qu’il ne soit attrapé, si toutefois il n’avait pas fui auparavant.
Nous avons eu droit également aux joutes, oui! oui! comme les joutes sètoises, avec tous les rebondissements que peut provoquer un tel sport, et là encore les bateliers, comme de juste, faisaient un festival, tout ceci avec les plongeons qui suivaient. Il y avait encore la poutre savonneuse qu’il fallait gravir au-dessus de l’eau ; difficile de ne pas prendre un bain là-aussi. Il y eut des courses de natation où l’on vit beaucoup de nageurs se prendre au jeu.
Tout ceci se passait sur une journée, un dimanche dans le courant de l’été, je l’ai vu à deux reprises vers 1947 et 1952. Ces bons moments existaient tout naturellement entre gens de la batellerie, les riverains du canal dont les fermiers, l’éclusière (je rappelle qu’il s’agit de ma mère), des habitants de la commune et même plus loin, fidèles au canal du Midi aussi, et dans des circonstances plus courantes tout au long de l’année. Nous verrons une prochaine fois d’autres aspects de la vie à l’écluse de Vic lorsque j’y étais enfant.
A bientôt donc…
André
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Note de Jean-François :
André nous raconte ses dimanches sur les rives du Canal du Midi en nous montrant quelques photos jaunies, précieusement conservées (probablement dans une boite à chaussures). Il nous parle vraiment d’une partie de la vie du Canal.
Tous ne savent pas nécessairement en quoi consistent les joutes nautiques. J’ai donc ajouté une carte postale ancienne qui en représente, non pas à l’écluse de Vic, mais à Sète, capitale des joutes nautiques languedociennes. Deux chevaliers, perchés sur une tintaine (planche fixée sur deux poutres à l’arrière d’une barque) armés d’une lance et d’un bouclier, essaient de conserver l’équilibre et de faire tomber l’adversaire.
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L’endroit décrit par André est évoqué sur le site avec quelques autres photos : écluse de Vic
Très agréable à lire et une description de loisirs simples , peu couteux, partagés en famille et entre voisins, sans faire de longues distances, un temps pas si lointain où les voisins se rencontraient à maintes occasions, où une manifestation réussie ne devait pas forcément attirer des milliers de personnes pour avoir du sens.
Merci André pour ce bon moment.
C’est la première fois que je laisse un commentaire.
Parce que j’avais peur d’inscrire quelque chose qui serait de la langue de bois.
Mais après plusieurs lectures, relectures, recherches dans ce blog magnifique, je ne peux qu’y réagir à présent.
Tous les souvenirs d’enfance sont doux, tendres, comme une caresse sur la joue que notre grand-mère nous faisait quand on jouait sagement.
A travers les explications d’André, les images d’un temps où l’on prenait le temps nous paraissent à portée de main.
Quelle que soit la région, nous avons tous nos souvenirs.
Parvenir à les faire partager comme André le fait, c’est magique.
Merci Monsieur pour ce partage qui donne chaud au cœur.
Pour savoir ou l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. Par ce témoignage sur la vie du Canal du midi il y a une cinquantaine d’années, André nous retrace une certaine convivialité et chaleur humaine perdue peut être un peu aujourd’hui. En tout cas, bravo pour tout ce travail.
Beaux souvenirs que vous nous racontez là.
Pour le repas en plein air, en lisant et relisant l’article et les commentaires, je pense qu’il était plus facile de le faire il y a 50 ou 60 ans dans la mesure ou pas trop de monde passait sur et aux alentours du Canal.
De nos jours, s' »exposer » de cette manière au tout venant, vu qu’il passe beaucoup plus de monde, dans le cadre d’une rencontre qui reste d’ordre privée, ne doit pas forcément convenir à tout habitant des maisons éclusières du Canal.
Ceci dit, cela peut être l’occasion d’échanges et de belles rencontres.
Pour connaitre pas mal d’endroits sur le Canal du Midi, et des maisons éclusières en particulier, certaines restent ouvertes sur leur environnement, et dans le respect de l’esprit originel des lieux.
C’est tout à fait ce qui ressort sur votre article et cet état d’esprit prévalais autrefois
En revanche, je déplore, de nos jour, que d’autres aient été entourées d’un mur, dénaturant par la même occasion l’esprit du bâtiment. Je pense en particulier à l’écluse du Bagnas et son mur : Écluse de Bagnas
En découvrant les articles de Nicolas, sur le blog des croqueurs de nature, je suis tout doucement arrivé sur ce blog, tout aussi passionnant et sur lequel publie aussi Nicolas.
Cependant, ce n’est pas sur l’une de ses publications que je vais commencer par écrire un commentaire, mais bien sur cet article écrit par André.
Félicitations pour ces témoignages précis, écrits avec le cœur.
Grace à tous les participants de ce blog, nous envisageons de découvrir le Canal du Midi, mais à pied, à vélo ou en bateau !!!??? Nous n’avons pas encore décidé.
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